Actrice, réalisatrice, égérie beauté et bientôt auteure… La sublime Lupita Nyong’o combine bien des talents, ce qui lui vaut aujourd’hui d’être admirée bien au-delà du milieu du cinéma. Mais si aujourd’hui, elle s’assume parfaitement avec sa peau sombre et ses cheveux crépus, il n’en a pas toujours été ainsi. Focus.
A 35 ans, le parcours de l’actrice oscarisée et star internationale a de quoi susciter l’admiration. Plus tôt cette année, le magazine Hollywood Reporter l’a d’ailleurs désignée l’actrice africaine la plus célèbre au monde. Mais encore plus que ses qualités de jeu, Lupita Nyong’o est également adulée pour sa beauté, son style et son assurance. Un signe qui ne trompe pas : elle s’est ainsi retrouvée à quatre reprises en couverture du Vogue américain et fût la première égérie noire à représenter la prestigieuse maison Lancôme. Et depuis cet été, c’est pour le parfum Calvin Klein Women qu’elle prête son image. Une notoriété dont elle se sert aujourd’hui pour évoquer ses difficultés à assumer sa couleur de peau et ses cheveux durant son adolescence et la façon dont elle les avait surmontées. Et ce, dans le but d’encourager les jeunes filles noires à s’accepter telles qu’elles sont.
Ainsi, lorsqu’elle reçut le prix de la Meilleure révélation féminine en 2014 lors de la cérémonie « Black Woman In Hollywood » organisée par le magazine Essence, elle prononça le discours de remerciement suivant :
« J’ai reçu une lettre d’une jeune fille et je voudrais partager juste une petite partie avec vous : « Chère Lupita, Je pense que tu es vraiment chanceuse d’être aussi noire et d’avoir malgré tout ce succès à Hollywood. J’étais sur le point d’acheter la crème Whitenicious de Dencia pour éclaircir ma peau lorsque tu es apparue et m’as sauvée ». Mon cœur a saigné quand j’ai lu ces mots, je n’aurais jamais pensé que mon premier emploi après l’école serait si important qu’il ferait de moi une figure d’espoir, de la même manière que les femmes de Couleur Pourpre l’ont été pour moi .
Je me souviens d’un temps où je ne me sentais pas belle. J’allumais la télé et je ne voyais que des peaux pâles, on m’a taquiné et raillé à cause de ma peau foncée. Et ma seule prière à Dieu, le faiseur de miracles, c’était de me réveiller avec une peau claire. Je me réveillais et j’étais si excitée à l’idée de voir ma nouvelle peau que je refusais de regarder mon corps jusqu’à ce que je sois en face d’un miroir parce que je voulais voir mon beau visage en premier. Et chaque jour, je vivais la même déception, j’étais aussi sombre que la veille. J’ai essayé de négocier avec Dieu, je lui ai dit que je cesserais de voler des morceaux de sucre la nuit s’il me donnait ce que je voulais, que j’obéirais à ma mère et je ne perdrais plus mon pull de l’école s’il me rendait un peu plus claire. Mais je suppose que Dieu n’a pas été impressionné par mes arguments parce qu’il n’a jamais écouté.
Et durant mon adolescence, ma haine contre moi même empirait, comme vous pouvez l’imaginer. Ma mère me rappelait souvent qu’elle pensait que j’étais belle mais ce n’était pas le sujet , ça ne comptait pas. C’était ma mère, c’est normal qu’elle pense que je suis belle. Et ensuite Alek Wek est apparue sur la scène internationale. Un célèbre top model, elle était sombre comme la nuit, elle était à tous les défilés et dans tous les magazines et tout le monde disait qu’elle était belle. Même Oprah (Winfrey) disait qu’elle était belle et ça en a fait une vérité. Je n’arrivais pas à croire que les gens trouvaient belle une femme qui me ressemblait autant. Mon teint avait toujours été un obstacle et tout d’un coup, Oprah me disait que ça ne l’était pas.
J’étais perplexe et je voulais rejeter cette idée parce que je commençais à apprécier la séduction qu’il y a dans l’inadéquation. Mais quelque chose commençait à grandir en moi, quand j’ai vu Alek, j’ai vu par inadvertance un reflet de moi-même que je ne pouvais pas renier. J’avais désormais du ressort parce que je me sentais plus remarquée, plus appréciée par les lointains gardiens des portes de la beauté. Mais autour de moi, la préférence pour les filles claires prévalait toujours, pour tous les gens qui comptaient pour moi, je n’étais toujours pas belle.
Et ma mère à nouveau, me disait qu’on ne mange pas la beauté, elle ne vous nourrit pas et ces mots me tourmentaient et me gênaient. Je ne les ai pas vraiment compris jusqu’à ce que je réalise finalement que la beauté n’est pas une chose que je pouvais acquérir ou consommer, c’était quelque chose que je devais être. Et ce que ma mère voulait dire quand elle disait qu’on ne mange pas la beauté, c’est que vous ne pouvez pas vous reposer sur votre beauté pour avancer. Ce qui est fondamentalement beau, c’est votre compassion envers vous-même et envers ceux qui vous entourent. Ce genre de beauté enflamme le cœur et enchante l’âme. C’est ce qui cause à Patsey (son personnage dans le film « 12 years A slave ») tant de problèmes avec son maître, mais c’est aussi ce qui a fait vivre son histoire jusqu’aujourd’hui. Nous nous souvenons de la beauté de son esprit, même après que sa beauté physique ait disparu. J’espère donc que ma présence sur les écrans et dans les magazines peut te conduire chère jeune fille, vers un parcours similaire. Que tu ressentira l’acceptation de ta beauté extérieure, et que tu travailleras sur ta beauté intérieure. »
Prochaine étape pour Lupita Nyong’o : la parution début 2019 d’un livre pour enfants intitulé Sulwe. Le livre raconte l’histoire d’une petite fille et de son parcours vers l’acceptation de sa peau sombre… Une affaire à suivre !
Pour lire l’intégralité du discours prononcé par Lupita Nyong’o lors de la septième édition de la cérémonie « Black Woman In Hollywood » organisée par le magazine Essence, cliquez ici.
Source photos : © Reportage photos réalisé par Patrick Demarchelier pour le dossier « Spécial cheveux » du magazine Allure paru en mars 2018 – Stylisme cheveux : Vernon François ; © Photo réalisée par Mario Sorrenti pour l’édition du mois de septembre 2018 du Porter Magazine. Styliste Cathy Kasterine.